jeudi 17 octobre 2013

Ecrire

C’est un tableau qui donne envie de peindre. Il est dans un musée. Il se veut abstrait. On aimerait l’habiter. Des lignes s’y rejoignent au-delà des formes. Juste des traits avec un vide qui suggère. Le regard les complète. Il franchit le vide qui les sépare. Parfois, il y en a comme ça, sur les vieux murs d’ardoise, des lignes formées par les fissures des pierres. La matière suggère. Elle écrit. Peindre ou écrire, une seule et même chose, le monde dans la main, disaient les vieux peintres chinois.

Ecrire.

Un chemin. Sur une ligne de crête, au soleil levant. Avec le mal-être dans le dos.

Le « mal » tire d’un côté. Sur les chemins bruyants le long du versant ensoleillé, il pousse à écrire. Ça commence toujours comme ça. « Ecrivez ! » Et le « mal » devient bavard. Il force le trait. La paille, la poutre, vous savez…, ça encombre les yeux, obscurcit le texte, incommode la lecture.

Et puis « l’être », de l’autre. Enfoui dans les forêts. Sur le versant ombré. Il voulait dire la substance de ce qui s’est écrit quand est née la parole. Puis, un jour, toutes les histoires qu’on avait besoin de raconter, ont disparu. Ne reste que ce désir qui pousse à dire encore et encore. Mais quoi ? Raconter, malgré tout, de petites histoires....  Autrement ? La vie n’est faite que de cela. On n’échappe pas aux petites histoires. On peut les aimer. Ou non. On peut en rire. En pleurer. Peut-être même y croire. C’est selon. Et tout ça, c'est encore la vie, dans tous ses états. Elle vient. Elle miroite. A travers ses yeux mi-clos, un soir de fièvre, quand s’endort le jour. Par un mail inattendu qui dévoile la neige tombée sur les cheveux d'un vieil ami, après des années d’absence. Quand la chaleur prend le corps dans son désir. Toujours, elle raconte. Le temps, cet artiste, à partir de mille riens, raconte. Car même si ces récits ne sont rien, rien ne se dit sans ces récits. Sans eux, nous ne sommes rien.

Ecrire rend intime à ce rien. Se fait locataire des fissures de nos certitudes.
Ecrire en se souvenant du mal, sans oublier l’être.
Ecrire, car devant sa page blanche, le monde, dans le même temps, se réordonne. De par la grâce de tous ses aménagements de plume. Ecrire car avec lui, vient le sentiment que les choses à nouveau se redéploient.

Ecrire. Respirer. Voilà le vent.  Encore.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire