-Tu as retrouvé ton chapeau ?
-Oh oui, je l'avais oublié dans un groupe, ils me l'ont gardé.
-Que leur as-tu raconté cette fois-ci ?
-Une histoire "vraie". C'était quelqu'un que nous aurions pu recevoir. Il s'est suicidé. Burn out, dépression. Ce n'était pas une surprise pour son entourage. Alors le chef, celui qui l'avait tant méprisé, tant harcelé, depuis des années, a dit aux autres :
-Il faudrait quand même que quelqu'un aille à ses obsèques.
-L'un d'eux a dit : Ce n'est pas un peu hypocrite, non ?
-Un autre a rétorqué : Oui, mais c'est quand même humain.
Un troisième a alors dit, le regard fuyant : On peut pas faire un peu les deux.... ?
-...
- J'ai vu son regard. Double comme ce qu'il a dit. Je me suis dit qu'il allait faire une belle carrière. Le pire, c'est qu'il avait l'air sympathique ...
Histoire absurde 5.
Vieil or, reflets dans le verre. Raisin sec qui miroite au soleil. Et cette étrange scène mordorée dans les éclats du vin.
-C’était Noël. J’étais seul dans la maison de mon père. Assis dans la grande salle. Les parfums de la cuisine fleuraient bon, par la porte entrouverte. J’avais voulu me faire un repas de fête, avec un menu sophistiqué. C’était Noël. Je me suis habillé. J’avais mis ma belle redingote. Installé à la table de la salle à manger, j'ai observé les lieux, les objets. La belle nappe, la vieille argenterie de famille, les grands verres de dégustation. Il fallait bien les utiliser. Ils s'entassaient dans l'armoire, empoussiérés au fil des ans, égrenant les histoires de toutes ces lignées de femmes, silencieuses, affairées, entre cuisine et jardin.
Quand je me levais pour aller chercher un plat, j’allais mettre mon tablier. Machinalement, pour ne pas me salir. Puis je revenais me servir en tablier. Comme un valet sert son maître. Avec cérémonie. Une fois servi, dans le salon, j’ai enlevé le tablier, j’ai remis ma redingote et je me suis ré-assis.
Ce n’était pas un rêve. Non. J’ai vraiment fait ça. Il y avait plusieurs plats. Alors j’ai recommencé plusieurs fois. Quand soudain j’ai réalisé ce que je faisais. J’ai cru devenir fou. Heureusement personne ne me voyait.
Quand je me levais pour aller chercher un plat, j’allais mettre mon tablier. Machinalement, pour ne pas me salir. Puis je revenais me servir en tablier. Comme un valet sert son maître. Avec cérémonie. Une fois servi, dans le salon, j’ai enlevé le tablier, j’ai remis ma redingote et je me suis ré-assis.
Ce n’était pas un rêve. Non. J’ai vraiment fait ça. Il y avait plusieurs plats. Alors j’ai recommencé plusieurs fois. Quand soudain j’ai réalisé ce que je faisais. J’ai cru devenir fou. Heureusement personne ne me voyait.
- Maître de maison et valet à la fois…
-Il y avait un grand miroir dans le salon. Je me suis vu une fraction de seconde dans ce vieux miroir de famille. Moi et mon cinéma. Je ne me suis pas reconnu.
-…
-J'ai pensé alors à ce si vieux souvenir. Mon père avant de mourir, voulait que je sois médecin et que je reprenne sa clientèle. Je n'en voulais pas de tout ça. Alors je suis parti, travailler dans un bistro à Paris. Faire le « Loufiat ». Dans un bistro, à Montmartre. Un jour, je passais devant un miroir près de la caisse. Je me suis vu avec ce tablier long des garçons parisiens. Et je ne me suis pas reconnu… Là non plus.
-Loufiat ?
-C’est le nom d’un personnage de la littérature. Il y avait également un maître d’hôtel au Procope qui se présentait ainsi. Dérision, dérision. Le nom est resté pour désigner la place de serveur, on dit même "faire le loufiat"…
Cela m’a intriguée. Je suis allée chercher… Loufiat… Loffiat, Loff… iat… Et j’ai lu :
« Loufiat : substantif masculin pour dire en argot ou de façon populaire, le garçon de café. Loffiat est l’idiot, l’homme simple, le goujat, le valet. Dérivé de Loffe, nigaud, ( 1790, Le rat du Châtelet), de l’onomatopée loff, le souffle du vent, et le suffixe iat.»
Je suis restée perplexe devant le mot et ces images étranges qui lui sont revenues à la mémoire.
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